Tout le monde a entendu parler de la comète Tchouri grâce à la mission Rosetta. Rosetta est une mission de l’Agence Spatiale Européenne (ASE/ESA) dont l’objectif principal est de recueillir des données sur la composition du noyau de la comète 67P/Tchouryumov-Gerasimenko surnommée Tchouri. La sonde Rosetta porte Philae, un atterrisseur autonome de 100 kg.

« Cette mission sans précédent (…) nous livrera des informations cruciales sur la formation du système solaire, la présence de l’eau, et peut-être l’origine de la vie sur Terre », a indiqué l’ESA.

La mission de Philae consiste à atterrir sans dommage à la surface de la comète et à transmettre des données scientifiques sur sa composition.

La comète Tchouri

 

La comète Tchouri

Tchouri en activité prise par Rosetta 21 juin 2015 – Copyright ESA/Rosetta/NavCam – CC BY-SA IGO 3.0

 

La comète Tchouri a été découverte en 1969 par l’astronome ukrainien Klim Ivanovitch Tchourioumov sur une photo de la comète 32P/Comas Solá prise par Svetlana Ivanovna Guérassimenko. Klim se rendit compte que l’objet photographié correspondait en fait à une nouvelle comète. Tchouri parcourt son orbite en 6,57 années. En mars 2003, le télescope spatial Hubble l’a photographiée, permettant de préciser les dimensions du noyau. C’est un objet de forme ellipsoïdale qui mesure 5 km sur 3 km et tourne sur lui-même en environ 12 heures.

67P/Tchouryumov-Gerasimenko tient son nom de ses deux découvreurs et du fait qu’il s’agit de la 67e comète périodique connue.

Le choix de la comète Tchouri pour cette mission est « fonction des exigences techniques provenant du satellite (distance minimale et maximale vis-à-vis du Soleil, carburant), du lanceur (conditions d’injection en orbite de libération et masse du satellite), mais aussi par l’intérêt scientifique », informe le CNES.

Voir aussi : Quelle est la différence entre astéroïde, météorite, comète et étoile filante ?

Le lancement de la sonde Rosetta

 

Le nom Rosetta évoque la pierre de Rosette, fragment de stèle gravée découverte en Égypte qui a permis le déchiffrage des hiéroglyphes au XIXe siècle. « La pierre de Rosette et l’obélisque de Philae ont servi de bases complémentaires au déchiffrement des hiéroglyphes par J.F. Champollion, en 1822.
L’orbiteur Rosetta et l’atterrisseur Philae serviront de bases à la compréhension des comètes, vestiges du système solaire », informe le site du CNES.

La sonde Rosetta est lancée le 2 mars 2004 par une fusée Ariane 5 depuis le Centre Spatial Guyanais. La trajectoire pour atteindre la comète est complexe. Rosetta emploiera ce qu’on appelle des « assistances gravitationnelles ». Il s’agit d’utiliser l’attraction d’un corps céleste (planète, lune) pour modifier naturellement la direction de sa trajectoire et augmenter sa vitesse. Ainsi elle survole la Terre à plusieurs reprises en 2005, 2007 et 2009 et Mars en 2007.

Avant d’atteindre sa destination, elle survole également deux astéroïdes : Steins en 2008 et Lutetia en 2010. Des photos seront fournies par l’instrument Osiris (Optical, Spectroscopic, and Infrared Remote Imaging System) afin d’étudier ces deux astéroïdes.

Plus de dix ans après avoir quitté la Terre, Rosetta atteint l’orbite de la comète le 6 août 2014.

Les rebondissements de Philae

 

 

L’atterrisseur, Philae, tient son nom d’une ancienne île du Nil, engloutie sous les eaux depuis la construction du haut barrage d’Assouan. Il s’est posé comme prévu sur le site J de la comète le 12 novembre 2014. Cet endroit a été sélectionné, car sa surface relativement plane donnait la possibilité de se poser. Il avait pour autre avantage son ensoleillement quotidien d’environ 6,5 heures. Suite à un concours lancé par l’ESA aux internautes, le site a ensuite été renommé Aguilkia d’après l’île sur le Nil qui accueille le temple d’Isis qui était autrefois sur l’île de Philae avant la construction d’un barrage.

Malheureusement, ni les vis dans les pieds, ni le système de propulsion, ni les deux harpons n’ont suffi à ancrer Philae au sol. La comète disposant d’une faible gravité, Philae, d’une masse de 100 kg, ne pèse alors que l’équivalent d’un gramme à la surface de la Terre. L’atterrisseur rebondit deux fois avant de se poser à environ un kilomètre de distance sur le site baptisé Abydos. Ce nom est une référence à l’ancienne ville sacrée d’Égypte qui prétendait détenir la tête d’Osiris. Il se trouve alors coincé entre des falaises, dans un lieu peu éclairé « avec beaucoup de rochers et d’ombre, mais une zone où le printemps cométaire débute seulement », assure Philippe Gaudon, chef de projet Rosetta au Cnes. Le robot fonctionne 60 heures d’affilée avant de s’éteindre. Ses batteries se rechargeant lorsque ses panneaux photovoltaïques captent le Soleil, Philae rentre alors en hibernation dans l’attente de meilleures conditions.

Le réveil de Philae

Heureusement, Tchouri passant au périhélie, c’est-à-dire au plus près du Soleil, en août 2015, les conditions d’ensoleillement évoluent favorablement au cours des mois suivants. L’atterrisseur se réveille et reprend contact avec l’orbiteur Rosetta le 13 juin 2015 : « La bonne nouvelle est arrivée dans le milieu de la nuit puisque Philae a répondu à nos sollicitations. On a eu environ 2 minutes de lien entre Rosetta et Philae et 40 secondes de données. Maintenant, il faut dépouiller tout cela, mais Philae est vivant », explique alors Jean-Yves Le Gall, président du Centre d’études spatiales.

Philae aura réussi à faire ses premières observations et prendre différentes mesures à l’aide de ses instruments avant que ses batteries se déchargent. Mais les tentatives de contact ultérieures se révéleront infructueuses.

Pendant ce temps, Rosetta poursuit quant à elle ses observations en suivant la comète de près. Elle prendra de nombreuses images à l’aide de la caméra de navigation et des deux caméras du système Osiris. Elle collecte également des échantillons de gaz et de poussière que la comète Tchouri éjecte dans l’espace.

 

Fin de la mission Rosetta

 

dernière image de Tchouri prise par Rosetta

dernière image de Tchouri prise par Rosetta Comet le 30 Septembre 2016

Le 30 septembre 2016 marque la fin de la mission. Rosetta s’écrase volontairement dans la région de Ma’at, nommée ainsi en référence à une déesse égyptienne. Durant les 14 heures de sa descente, la sonde spatiale prend des photos avec ses caméras et effectue des mesures des propriétés de gaz, de la poussière cométaire ainsi que du plasma.

Résultats

« Il y a trois grandes familles de résultats : des images du noyau, des confirmations d’hypothèses et des découvertes inattendues. Pour commencer, les résultats les plus spectaculaires sont ces paysages absolument incroyables obtenus par le système imageur Osiris » informe Anny-Chantal Levasseur-Regourd, spécialiste des comètes et impliquée dans le projet Rosetta depuis ses débuts.

La forme en canard de la comète, composée de deux lobes de taille différente reliés par un cou, est inattendue. Elle résulte probablement de l’agrégation de deux corps à très faible vitesse. « Notre étude prouve pour la première fois que des collisions douces et des fusions se sont produites, conduisant à la formation de ces corps à deux lobes », précise le chercheur Matteo Massironi.

La comète contient les éléments qui auraient pu contribuer à la formation de la vie sur Terre : la glycine, un acide aminé qui se trouve couramment dans les protéines et du phosphore qui est le composant essentiel de l’ADN. Des composés organiques ont été également détectés.

Certaines comètes sont déjà connues pour avoir de l’eau avec une composition similaire à celle de nos océans. Dans le cas de Tchouri, les scientifiques découvrent que l’eau de la comète est différente de celle de la Terre. « Nous devons conclure que l’eau terrestre a été plus probablement apportée par des astéroïdes que par des comètes », indique Kathrin Altwegg de l’Université suisse de Berne lors d’une conférence de presse.

Rosetta qui a parcouru 7,9 milliards de kilomètres est la première sonde à avoir escorté une comète dans sa course, pendant plus de deux ans. Les 21 instruments de Rosetta et Philae ont permis d’accumuler un grand nombre d’informations sur les caractéristiques de la comète qui occuperont les scientifiques pendant des décennies. Ces données permettront des avancées sur la connaissance du système solaire.

 

Pour aller plus loin

 

DVD : L’Odyssée Rosetta, 900 jours sur une comète

Un documentaire de Jean-Christophe Ribot

Tourné pendant trois ans dans les coulisses de la mission, ce documentaire riche en émotions et en découvertes scientifiques fait revivre les moments cruciaux de cette épopée spatiale.

 

L’aventure Rosetta : Aux origines de la vie

Au-delà de l’exploit technologique et de la fascination pour les objets mystérieux que sont les comètes, le livre l’Aventure Rosetta s’attache à montrer comment cette mission historique s’inscrit dans la longue histoire de la connaissance.

 

 

Sources

Cnes

Rosetta

ESA