Le discours de remise du prix Nobel de physique de Ulf Danielsson, membre suédois de l’académie des sciences et du comité Nobel, le 8 octobre 2019 a commencé par ces quelques phrases :
Our whole universe was in a hot, dense state, then nearly 14 billion years ago expansion started.
Notre univers entier était dans un état chaud et dense, puis l’expansion a commencé il y a près de 14 milliards d’années.
Vous l’aurez peut-être reconnu, il s’agit des paroles du générique de la série The Big Bang Theory.
À la fin de la série américaine, les deux personnages de The Big Bang Theory, Sheldon et Amy, reçoivent justement le prix Nobel de physique.
Cette année, dans la vraie vie, les récompensés sont pour moitié les deux Suisses découvreurs de la première exoplanète autour d’une étoile, Michel Mayor et Didier Queloz, et pour l’autre moitié le cosmologiste canadien James Peebles.
BREAKING NEWS:
The 2019 #NobelPrize in Physics has been awarded with one half to James Peebles “for theoretical discoveries in physical cosmology” and the other half jointly to Michel Mayor and Didier Queloz “for the discovery of an exoplanet orbiting a solar-type star.” pic.twitter.com/BwwMTwtRFv— The Nobel Prize (@NobelPrize) October 8, 2019
James Peebles, pionnier de la cosmologie
James Peebles est un théoricien en cosmologie qui a consacré sa carrière à étudier l’évolution de l’Univers, du Big Bang à aujourd’hui. Il a été récompensé « pour des découvertes théoriques en cosmologie physique ».
Le physicien entame sa carrière au début des années 1960 dans la même université où, aujourd’hui, à l’âge de 84 ans, il est chercheur émérite : l’Université de Princeton. Après des études à l’université du Manitoba au Canada, il y effectue sa thèse de 1958 à 1962, encadré par Robert Dicke. C’est grâce à ce dernier que James Peebles s’intéresse à la théorie du Big Bang dès 1964.
Pendant leurs observations des années 1963 – 1965, Arno Penzias et Robert Wilson détectent un signal qui se trouvera être le fond diffus cosmologique.
C’est un rayonnement thermique qui baigne l’espace tout entier à une température qui est aujourd’hui de 2,7 Kelvin (-270,4 °C). Ce rayonnement est un reliquat de la période d’intense chaleur de l’Univers, 380 000 ans après le Big Bang.
Afin de comprendre le phénomène observé, Penzias et Wilson prennent contact avec des théoriciens de l’Université de Princeton dont Dicke et Peebles.
Arno Penzias et Robert Wilson obtiennent le prix Nobel de physique en 1978.
James Peebles devient alors l’un des pionniers de l’étude de ces premières lumières de l’univers également appelées le rayonnement fossile. Il sera le premier à en expliquer l’importance. Il étudie ses rapports avec la naissance des galaxies ainsi qu’avec les grandes structures qui les rassemblent.
Le cosmologue est un pionnier de ce que l’on appelle maintenant le modèle standard de la cosmologie.
D’après ce modèle, il n’y a pas que de la matière ordinaire dans l’Univers.
Il existe un autre type de matière indétectable, la matière noire, qui tient une place importante dans la formation des grandes structures de l’Univers. À cette matière noire s’ajoute une énergie sombre.
Mais la composition de cette matière noire reste l’un des plus grands mystères de la cosmologie.
En 1982, Peeble développe l’idée qu’il s’agit de matière noire froide constituée de particules massives et lentes (par rapport à la vitesse de la lumière).
Lors de la remise de prix, Ulf Danielsson a comparé la vision du cosmologiste à un café au lait sucré (à 8 min dans la vidéo tout en bas de la page). Le café serait l’énergie noire soit 69 % de l’Univers, le lait représenterait la matière noire soit 26 % et le sucre, la matière ordinaire de nos atomes qui constitue 5 % de l’ensemble. Par contre nous ne connaissons pour l’instant ni la nature de l’énergie noire ni celle de la matière sombre qui sont toujours indétectables.
James Peebles est aujourd’hui considéré comme l’un des pères de la cosmologie moderne.
« Quelles avancées particulières ai-je faites ? J’aurais beaucoup de mal à le dire. C’est le travail d’une vie » Peeble au téléphone lors de l’annonce du Prix.
Michel Mayor et Didier Queloz, découvreurs d’exoplanètes
Si aujourd’hui de nouvelles exoplanètes sont régulièrement détectées, la toute première planète autour d’une autre étoile que le Soleil a été découverte en 1995 par Michel Mayor et son doctorant Didier Queloz. Depuis l’Observatoire de Haute-Provence, ils ont remarqué une infime irrégularité dans le mouvement de l’étoile 51 Pegasi. Cette perturbation était due à la présence à proximité de son exoplanète nommée par la suite 51 Pegasi b, similaire à Jupiter. Mais ils ont dû lutter contre le scepticisme de grand nombre de collègues scientifiques qui ne croyaient pas en cette interprétation des mesures et qui pensaient que ces fluctuations étaient simplement dues à des oscillations de l’étoile. Pourtant les deux astronomes avaient bel et bien raison ! Depuis ce jour, 4118 exoplanètes ont été découvertes. Les conditions d’habitabilité de ces planètes sont étudiées mais pour l’instant le cas de la Terre reste exceptionnel ! Aucune vie extraterrestre n’a encore été détectée.
Michel Mayol et Didier Queloz auront tout de même dû attendre plus de 20 ans pour obtenir enfin le Prix Nobel pour cette découverte majeure.
Sources