Ces derniers jours, la NASA a rallumé 4 propulseurs de la sonde Voyager 1 après 37 ans d’inactivité. Mais pourquoi réveiller des propulseurs qui dormaient bien tranquilles depuis aussi longtemps ? Voyager 1 est actuellement le seul objet de fabrication humaine dans l’espace interstellaire, à plus de 21 milliards de kilomètres de la Terre.
Comment Voyager communique-t-il avec la Terre ?
Mais comment Voyager arrive-t-il à nous transmettre des informations ?
Ces informations sont fournies par des capteurs embarqués sur Voyager qu’il faut ensuite transmettre vers notre planète. Pour cela, on a affecté à chacune des 2 sondes, Voyager 1 et Voyager 2, une antenne longue de 3,7 mètres de diamètre dirigée en permanence vers la Terre. L’engin spatial qui a récemment fêté ses 40 ans utilise des propulseurs appelés « propulseurs de contrôle d’attitude » pour s’orienter afin qu’il puisse communiquer avec la Terre. Ils fonctionnent par très petites impulsions d’à peine quelques millisecondes appelées « soufflées » afin d’orienter très délicatement l’engin spatial pour que l’antenne pointe bien vers la Terre. Des capteurs stellaires capturent les images des étoiles qui constituent des points fixes que la sonde utilise pour se stabiliser et se repérer afin de savoir vers où pointer son antenne. Une fois stabilisé, Voyager nous envoie alors les informations sous forme d’ondes radio. La vitesse de ces ondes est de 300 000 km/s mais étant donnée la lointaine distance de Voyager, elles mettent de nombreuses heures avant de nous parvenir.
Le Deep Space Network (réseau d’exploration de l’espace profond) de la NASA constitué de trois stations, à Goldstone en Californie, à Madrid en Espagne, et près de Canberra en Australie va alors capter ce signal qui est très petit. Il devient en effet de plus en plus faible au fur et à mesure que la sonde s’éloigne. Chacune de ces stations est constituée d’une antenne parabolique de 70 mètres de diamètre et est capable de détecter une fraction d’un milliardième de milliard de watt ! Les informations reçues sont alors analysées par les ingénieurs de la NASA.
Propulseurs de Voyager 1 endommagés
Depuis 2014, les ingénieurs ont remarqué que les propulseurs de contrôle d’attitude étaient abîmés, ce qui n’est pas très étonnant après 40 ans de bons et loyaux services… Les propulseurs nécessitent de plus de ‘soufflées’ pour dégager la même quantité d’énergie. Et à plus de 21 milliards de kilomètres de la Terre, il paraît difficile de les réparer… Pour résoudre ce problème, un groupe d’experts en propulsion s’est rassemblé au Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la NASA.
Ils se sont mis d’accord sur une solution pour le moins inattendue… Réveiller des propulseurs appelés ‘propulseurs TCM’ destinés aux corrections de trajectoire (Trajectory Correction Manœuvres) qui n’avaient pas servi depuis 37 ans…
Les propulseurs TCM sont placés à l’arrière de la sonde et sont identiques en taille et en fonctionnalité aux propulseurs de contrôle d’attitude. Le 8 novembre 1980, ils ont été utilisés pour faire maintenir une trajectoire correcte à Voyager 1 pendant qu’il passait près de Saturne. Ils n’ont pas servi depuis. En effet, Voyager n’a pas besoin de propulsion puisqu’il se situe dans le vide intersidéral de l’espace, hormis quand il doit envoyer ses signaux sur Terre. Mais il y a 37 ans, ils ont été utilisés dans un mode plutôt continu et non par petites ‘soufflées’ !
En 40 ans, l’informatique ayant fait beaucoup de progrès et subi des changements considérables, les ingénieurs ont dû réapprendre un langage vieux de plusieurs décennies pour la mise en marche de ces 4 propulseurs.
« L’équipe de vol de Voyager a déterré des données datant de plusieurs décennies et elle a examiné le logiciel codé dans un langage obsolète, pour s’assurer que nous pouvions tester les propulseurs en toute sécurité », explique Chris Jones, ingénieur en chef de JPL.
Test réussi !
Le 28 novembre dernier, les ingénieurs de la NASA ont donc rallumé ces 4 propulseurs TCM pour la première fois depuis 37 ans afin de tester leur capacité à réorienter Voyager 1. La sonde n’étant pas à côté, ils ont dû attendre 19 longues heures et 34 minutes pour que les résultats traversent l’espace et arrivent jusqu’à l’antenne du réseau de la NASA située à Goldstone en Californie. Leur patience aura été récompensée : les 4 propulseurs fonctionnent parfaitement ! Suite à ce test, l’étape suivante planifiée est de basculer sur les propulseurs TCM à partir de janvier.
« Avec ces propulseurs qui fonctionnent encore après 37 ans sans utilisation, nous devrions être capable d’étendre la vie de Voyager 1 de deux ou trois ans », informe Suzanne Dodd, responsable du projet Voyager au JPL de la NASA à Pasadena en Californie. Le générateur électrique nucléaire au plutonium est la seule source d’énergie qui s’épuise avec le temps. Beaucoup d’instruments embarqués ont été éteints pour l’économiser. Jusqu’ici la Nasa estimait que l’on perdrait contact avec Voyager 1 vers 2025.
Du coup, à la vue de leur réussite, les scientifiques envisagent de faire le même test pour sa consœur Voyager 2 même si ses propulseurs de contrôle d’attitude ne sont pas encore aussi endommagés. Notons que Voyager 2 actuellement à plus de 17,4 milliards de kilomètres de nous devrait lui aussi rentrer dans l’espace interstellaire dans les prochaines années. La NASA nous tient au courant de la progression de Voyager 1 et 2 en temps réel par ici.
Voir aussi Les 40 ans de Voyager 1 et 2
Sources