Des fragments d’une météorite tombée en octobre 2008 dans le désert du Soudan provenant de l’astéroïde 2008 TC3 ont été analysés. Les résultats montrent que cette météorite proviendrait d’une planète disparue du système solaire.

Catalina Sky Survey

Le 6 octobre 2008,  Richard Kowalski, un astronome américain du Mount Lemmon Observatory faisant partie du Catalina Sky Survey, découvre un astéroïde géocroiseur de deux à cinq mètres de diamètre, qui doit toucher la Terre sous peu. Le Catalina Sky Survey est un projet qui a pour objectif de découvrir des comètes et astéroïdes ainsi que rechercher des objets géocroiseurs, c’est-à-dire des objets évoluant à proximité de la Terre.

Les scientifiques suivent alors sa chute et une expédition est mise sur pied afin de retrouver des débris de l’astéroïde. L’objet s’est majoritairement vaporisé dans l’atmosphère, mais 280 fragments de la météorite nommée Almahata Sitta (station six en arabe, d’après le nom d’une gare de chemin de fer proche) ont pu être récoltés. Des équipes de l’EPFL (l’École polytechnique fédérale de Lausanne) les ont alors analysés. Le 17 avril 2018, une étude est parue dans la revue Nature Communication.

« On a eu de la chance, elle est tombée précisément où il fallait ! Dans l’eau ou en dehors d’un désert, il aurait été quasiment impossible d’en récupérer des fragments et de les analyser », précise  Cécile Hébert, professeure à l’EPFL et coauteure  de cette étude. En effet, les débris noirs de l’astéroïde ressortaient bien sur le sol sableux du désert au nord du Soudan près de la frontière égyptienne.

 

Fragment de 2008 TC3 découvert le 28 février 2009 par Peter Jenniskens, avec l'aide d'enseignants et d'étudiants de l'université de Khartoum, dans le désert Nubien au Soudan.

Fragment de 2008 TC3 découvert le 28 février 2009 par Peter Jenniskens, avec l’aide d’enseignants et d’étudiants de l’université de Khartoum, dans le désert Nubien au Soudan. credit : NASA / SETI / P. Jenniskens

Des diamants retrouvés dans la météorite

 

Ces fragments contiennent de minuscules diamants ! Au début, les scientifiques n’ont pas été surpris, car lors de la collision, il arrive que des pierres précieuses se forment. Vous vous doutez bien que depuis 2008, ils avaient eu le temps d’être étudiés. Mais un détail avait échappé aux scientifiques. Et rien de tel qu’un regard neuf !  C’est un doctorant, Farhang Nabiei, premier auteur de l’étude, qui le trouve : des inclusions. Les inclusions sont ce qui rend une pierre précieuse moins pure et donc moins chère pour les joailliers ! Ce sont les impuretés de forme solide, liquide ou gazeuse qui ont été piégées dans le diamant au moment de sa formation.

Les débris ont été observés au moyen de techniques avancées de microscopie électronique, au Centre interdisciplinaire de microscopie électronique de l’EPFL. Et là, pour la première fois sur des diamants d’origine extraterrestre, de nombreuses inclusions de chromite, de phosphate, et de sulfures fer-nickel ont été découvertes.

 

Une lame mince de la météorite d'Almahata Sitta

Une lame mince de la météorite d’Almahata Sitta.© EPFL

Une planète disparue du système solaire

 

Les scientifiques en ont déduit qu’ils ont été créés à très haute pression, à l’intérieur d’un corps planétaire de taille comprise Mercure et Mars. « Ces inclusions nous permettent de mieux comprendre dans quelles conditions ces diamants ont été créés », indique le géophysicien Philippe Gillet « Au vu de la taille des diamants, leur formation n’est probablement pas le fruit d’une collision ou d’une déposition en phase vapeur, qui en produisent généralement des plus petits. Il est donc probable que de tels diamants aient été créés dans les profondeurs d’une planète. L’étude des inclusions nous a justement permis de raffermir cette hypothèse. »

« Ces observations suggèrent que les diamants n’auraient pu être formés qu’en étant ensevelis sous des kilomètres de roches, dans les profondeurs d’une planète de la taille de Mars ou de Mercure, décrit Cécile Hébert. De plus, la composition du fragment ne correspond pas à des débris venant d’un astre connu, tel que la Lune ou Mars, il appartiendrait à une planète disparue », ajoute Cécile Hébert.

Les modèles de la formation du Système solaire prévoient que pendant les premiers millions d’années, de nombreux embryons de planètes appelés protoplanètes se sont formés dans le disque entourant le jeune Soleil (disque protoplanétaire), mais qu’ils ont ensuite disparu. Cette étude apporte enfin une première preuve de leur existence.

 

Voir aussi :
Quelle est la différence entre astéroïde, météorite, comète et étoile filante ?
Pluie de diamants sur Neptune et Uranus

Pour aller plus loin

 

météorites entre ciel et Terre exposition Jardin des PlantesL’exposition « Météorites, entre ciel et terre » est présentée à Paris dans la Grande Galerie de l’Évolution du jardin des plantes jusqu’au 10 juin 2018.

 

Une belle histoire des météorites (Coédition Flammarion / Muséum national d’histoire naturelle) écrit par Matthieu Gounelle, commissaire scientifique de l’exposition, professeur du Muséum et membre de l’Institut universitaire de France, est publié à l’occasion de l’ouverture de cette exposition.

 

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Source

A large planetary body inferred from diamond inclusions in a ureilite meteorite