Une récente étude estime que les nuages de Vénus pourraient accueillir une forme de vie extraterrestre. Vénus, la deuxième planète du système solaire, est appelée la « sœur jumelle » de la Terre de par ses dimensions (95 % de la taille de la terre et 4/5ème de sa masse) et sa densité proche de celles de notre planète. C’est pourquoi il a longtemps été pensé qu’il pourrait y avoir de la vie sur Vénus. Jusqu’à ce que l’on découvre que la planète est un véritable enfer ! Les conditions sur Vénus sont devenues inhospitalières rendant la vie sur sa surface difficile à imaginer…

 

Exploration de Vénus

 

Vénus en vraies couleurs vue par Mariner 10

Vénus en vraies couleurs vue par Mariner 10

En 1962, à partir d’observations radar menées par le Jet Propulsion Laboratory, on apprend que Vénus tourne sur elle-même en 243 jours. La planète tourne très lentement dans le sens inverse de son mouvement orbital (on appelle cela la rotation rétrograde). Elle est donc en sens contraire par rapport à la Terre et à la plupart des autres planètes. Une année sur Vénus ne dure même pas une journée vénusienne. En effet, la planète met 224,7 jours pour tourner autour du Soleil, soit 0,924 jour.

Envoi de sondes sur la planète

À partir du début des années 1960, des sondes ont été envoyées sur la planète pour l’étudier de près. Depuis, une vingtaine l’ont survolée, orbité autour ou encore largué des modules d’observation dans son atmosphère et sur sa surface.

Vue d'artiste de Mariner 2 (NASA-JPL)

Vue d’artiste de Mariner 2 (NASA-JPL)

 

En 1962, la sonde américaine Mariner 2 effectue le premier survol de la planète suivie de Mariner 4 en 1967.

Le programme soviétique Venera envoie plusieurs missions spatiales automatiques dans les années 1960 et 1970 pour étudier Vénus. Venera 7 réussit en 1967 à se poser sur la planète.

 

Vue d'artiste de l'atterrisseur Venera 9 posé sur le sol de Vénus.

Vue d’artiste de l’atterrisseur Venera 9 posé sur le sol de Vénus. (wikipedia)

En 1981, deux sondes jumelles Venera 13 et 14 sont lancées avec succès. Venera 13 réalise la première photo en couleurs de la surface de Vénus. Son système de refroidissement lui permet de tenir 2 heures durant lesquelles il photographie ce qui l’entoure et transmet les images à la Terre avant que l’électronique embarquée ne grille sous l’effet de la chaleur.

 

Des signes de vie visibles sur les photos de Vénus ?

 

Photo de Vénus par Vénéra 13

Photo de Vénus par Venera 13. le scientifique Leonid Ksanfomalitile pensait que l’objet en forme de disque était une créature vivante. Credit: Leonid Ksanfomaliti/ Solar System Research

 

Dans un article paru dans la revue Solar System Research, Leonid Ksanfomaliti de l’Institut de recherche spatiale de l’Académie des sciences de Russie, a émis l’hypothèse que des signes de vie sur Vénus étaient visibles sur les images prises par Venera 13. Selon lui, certains objets ressemblant à un « disque », un « rabat noir » et un « scorpion »« apparaissent, bougent et disparaissent ». Il fait ainsi référence à leur emplacement changeant sur les différentes photos et aux traces au sol. Cette théorie a largement été critiquée en raison de la forte température présente sur Vénus. Par la suite, ces formes ont été identifiées, ce sont simplement les caches des objectifs de la sonde qui ont été éjectés par un ressort et ont atterri un peu plus loin.

planisphère de Vénus

Planisphère de Vénus réalisé par le Jet Propulsion Laboratory de Pasadena à partir des informations envoyées par la sonde Magellan pendant la période 1990-1991

 

En orbite entre 1990 et 1994 autour de Vénus, la sonde Magellan a réalisé la première carte détaillée de la surface planétaire. Sa surface est dominée à 70 % par des plaines, les reliefs sont concentrés dans 2 grandes régions de hauts plateaux de la taille de continents : Ishtar Terra et Aphrodite Terra. La surface de Vénus se caractérise par un sol couvert de lave et la présence de très nombreux édifices volcaniques. Cela indique que la planète a été très active du point de vue géologique jusqu’à une époque très récente.

 

Cratères présents à la surface de Vénus © NASA/JPL

Cratères présents à la surface de Vénus © NASA/JPL

 

Plus récemment, la sonde spatiale Venus Express a été lancée en novembre 2005 par l’ESA (l’agence spatiale européenne). Elle a observé Vénus depuis avril 2006 jusqu’au 16 décembre 2014.

 

Vie sur Vénus, des conditions inhospitalières à la surface

Si la vie sur Vénus existait, elle devrait se confronter à des conditions particulièrement inhospitalières ! Sur cette planète, la pression au sol est de plus de 90 fois supérieure à celle que nous ressentons sur Terre. On peut la comparer à celle que l’on ressent en plongée à 900 mètres de profondeur dans l’océan. De plus, Vénus possède une atmosphère opaque et très dense qui dissimule complètement le sol.

Des pluies d’acide sulfurique

Les vents au sol sont très lents, mais en altitude les nuages de la haute atmosphère se déplacent à près de 350 km/h et font le tour de la planète en 4 jours terrestres (60 fois plus vite que la rotation de la planète sur elle-même). L’origine de cette super rotation observable en UV n’est pas encore bien comprise.

 

atmosphère de Venus

Nuages de l’atmosphère de Vénus révélés par ultraviolet. La forme en V caractéristique des nuages est due aux vents plus rapides soufflant à l’équateur. credits : NASA

Les nuages opaques sont concentrés dans une couche d’environ 20 km, entre 45 et 65 km d’altitude. Ils sont composés principalement de gouttelettes d’acide sulfurique. Autrement dit, sur Vénus il pleut non pas de l’eau, mais de l’acide sulfurique ! Mais en raison de la chaleur, les gouttelettes s’évaporent avant d’atteindre le sol.

Vénus, la plus chaude planète du système solaire

La température au sol est de 480 °C et varie très peu. Pourquoi est-elle plus chaude que Mercure (430 °C pour Mercure le jour et -100 °C la nuit) alors qu’elle est plus éloignée du Soleil ? Tout simplement à cause de l’effet de serre. Le même qui dérègle actuellement notre climat. L’atmosphère est composée majoritairement (à environ 96,5 %) de dioxyde de carbone (CO2) ce qui crée un effet de serre considérable.

 

Un climat habitable sur Vénus il y a 2 milliards d’années

 

Si les conditions sur Vénus sont aujourd’hui difficiles, cela n’a pas toujours été le cas. « Certains modèles suggèrent que Vénus avait autrefois un climat habitable avec de l’eau liquide sur sa surface pendant 2 milliards d’années. C’est beaucoup plus long (que la durée estimée sur Mars) », indique Sanjay Limaye, spécialiste des atmosphères planétaires et auteur principal d’une étude dans Astrobiology.

Carl Sagan (et Neil deGrasse Tyson dans la version plus récente) nous l’explique dans la série Cosmos.

La Terre et Vénus avaient au départ la même quantité de carbone, mais elles ont évolué différemment. Pourquoi une telle différence aujourd’hui ? L’explication avancée est que sur Terre les plantes ont absorbé le dioxyde de Carbone (CO2) et l’ont transformé alors que sur Vénus, il est resté dans l’atmosphère créant un effet de serre incontrôlable qui a causé l’évaporation de l’eau de la planète. La surface est devenue si brûlante que l’on pourrait y fondre du plomb. Vénus est totalement recouverte de nuages d’acide sulfurique qui empêchent les rayons solaires d’atteindre la surface, mais les quelques rayons du Soleil qui parviennent à franchir sa couverture nuageuse n’arrivent pas à repartir. Leur énergie est emprisonnée par l’atmosphère chargée en CO2. Ce gaz agit comme un couvercle et conserve la chaleur. Vénus ayant perdu ses océans il y a des milliards d’années, le CO2 de l’atmosphère n’a pas pu être capturé et stocké sous une forme minérale. Le CO2 émis par les volcans de Vénus a continué de s’accumuler dans l’air. L’atmosphère de Vénus est de nos jours 90 fois plus dense que la nôtre et composée presque uniquement de ce gaz à effet de serre. Ce qui rend évidemment cette planète hostile pour la vie.

Sur Terre, la plupart du carbone a été stocké dans les roches. Les volcans ont saturé l’atmosphère de CO2 que les océans ont absorbé peu à peu. Au fil des millions d’années, des algues microscopiques 1000 fois plus petites qu’une tête d’épingle ont récolté le CO2 et l’ont métabolisé en minuscules coquilles qui se sont accumulées au point de créer d’épais dépôts de grès ou de calcaire marin au fond de l’océan. Par la suite, les soubresauts de la Terre ont fait remonter les fonds marins et émerger d’immenses falaises.

 

falaises blanches de Douvres

falaises blanches de Douvres

Certaines créatures marines ont également utilisé le CO2 pour former des récifs de corail. Finalement, il ne reste que moins de 0,03 % de ce gaz dans notre atmosphère. Mais à petite dose l’effet de serre a du bon ! Car sans ces 0,03 % la Terre serait une planète gelée !

Nos forêts absorbent le CO2 présent dans l’air grâce à la photosynthèse et constituent avec les océans un puits de carbone. Mais la déforestation interrompt ce processus naturel de stockage de CO2. En cas de destruction de forêt, le gaz à effet de serre est libéré et rejeté dans l’atmosphère.

Attention à ne pas transformer la Terre en enfer comme Vénus !

Aujourd’hui l’homme utilise le calcaire et rejette le CO2 pour faire du béton et du ciment, brûle des fossiles, rejette du CO2 pour se déplacer. Nous éjectons 30 milliards de tonnes de ce gaz par an ce qui n’est pas sans conséquence et amène à un réchauffement climatique. L’exemple de Vénus devrait pourtant nous servir de leçon.

De la vie dans les nuages de Vénus ?

Si la vie sur Vénus paraît très peu probable, peut-être ses nuages peuvent-ils abriter une forme d’existence extraterrestre ! Déjà, en 1967, Carl Sagan et Harold Morowitz émettent l’hypothèse qu’il pourrait y avoir de la vie dans les nuages de Vénus. L’astrobiologiste David Grinspoon développa également cette idée en 1997. En effet, les températures (entre 0 et 60 °C) et les pressions (entre 0,4 et 2 atmosphères) sont beaucoup plus clémentes qu’à la surface de la planète. Mais à l’heure actuelle nous n’en avons toujours pas la preuve.

À son tour, Sanjay Limaye a décidé de creuser le sujet. Elle explique « Vénus montre quelques taches épisodiques riches en soufre, avec des contrastes allant jusqu’à 30-40 % dans l’ultraviolet, et une absorption des longueurs d’onde plus longues. Ces taches persistent pendant des jours, changeant constamment de forme et de contraste, et semblent dépendre de l’échelle ». Des bactéries terrestres dont les propriétés d’absorption de la lumière sont comparables à ces particules sombres de nature inconnue ont presque les mêmes dimensions. Il est donc envisageable qu’après la disparition des océans de la surface de la planète, des bactéries se soient réfugiées en altitude dans les nuages où les conditions sont plus hospitalières.

« Sur Terre, nous savons que la vie peut prospérer dans des conditions très acides, se nourrir de dioxyde de carbone et produire de l’acide sulfurique. L’atmosphère de Vénus renferme de telles conditions ce qui y rend probable le développement de la vie », affirme Rakesh Mogul, coauteur de l’étude.

« Pour vraiment savoir, nous devons y aller et goûter les nuages, Vénus pourrait être un nouveau chapitre passionnant dans l’exploration de l’astrobiologie. »

Peut-être lors de la mission VAMP (Venus Atmospheric Maneuverable Platform) que la NASA souhaite lancer en 2021. Il s’agit d’un projet de structure gonflable qui pourrait voler un an dans l’atmosphère de Vénus.

 

Pour aller plus loin

Vénus dévoilée: Voyage autour d’une planète

Vénus dévoilée - Livre Vénus

Ce livre de 1987 a été écrit par Jacques Blamont, professeur à l’université de Paris VI, directeur scientifique et technique du Centre national d’études spatiales pendant les dix premières années d’existence de cette agence.

Ici il nous raconte l’histoire de l’exploration de Vénus dans un récit captivant. 

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Sources

Venus’ Spectral Signatures and the Potential for Life in the Clouds

Cosmos : a personal voyage episode 4 (Carl Sagan)

Cosmos : une odyssée à travers l’univers, un monde libéré (épisode 12)

Livescience

sci-news

CNES